Prologue : Marc Michiels pour la partie Orientale de l’ouvrage Divine mélancolie, Marc Michiels (2019) – Éditions Lelivredart.
Faut-il voir une étude inspirante des films Bleu, Blanc, Rouge de Krzysztof Kieslowski dans la création de cette Odyssée moderne ? « L’Écart absolu » où Ulysse fait entrevoir d’autres chemins dans une dérive onirique d’un formalisme étranger à la réalité ? Mais c’est Le Temps scellé d’Andreï Tarkovski qui dictera cette présentation :
Nous sommes crucifiés dans une seule dimension, alors que le monde est multidimensionnel. Nous le sentons, et nous souffrons de l’impossibilité de connaître la vérité.
Mais il n’est pas nécessaire de connaître.
Il faut aimer.
Et croire.
La foi est la connaissance acquise à l’aide de l’amour…
Comment distinguer alors la vérité de l’erreur ? Si nous ne sommes pas ceux que nous sommes ! Il faudra aller plus loin que ce que propose Hermann Hesse ! Pour moi, le poète est quelque chose qu’il lui est permis d’avoir été, d’être et de devenir. Nous ne savons pas si le fil de la vie ne va pas se casser à chaque instant ! Et c’est justement la raison de ces espaces fragmentaires, ces souvenirs, cette sensation formelle, ces tableaux, ces images, ces mots qu’il faut réorganiser dans des transformations successives et sans fin de la narration visuelle. Jusqu’à trouver ce qui fait sens.
Nous nous rendrons compte alors que le vide est en apesanteur et que nous ne tomberons pas. Nous nous perdrons dans ce labyrinthe des fausses images, des fausses perceptions ! Le dédoublement du sensible, les significations superposées des invariances ne peuvent pas être posées ailleurs que dans l’espace vacant, effacé et trouble du désir.
Nous assisterons impuissants au sommeil profond de notre âme, sensation d’un brouillard qui rend floue la scène, réveillés par le spectacle des voix perdues dans la nuit, qui irradie le décor !
Comme le soleil rouge qui parsème de sa chaleur, le corps blanc des nuages, ces vastes marécages. Pour redevenir ce si beau jardin, tacheté d’ombre et de lumières. Têtes d’argile, comme le ciel qui se reflète dans un miroir sans tain. Un océan du tout, du haut et du bas, équilibre nocturne d’un voyage éternel.
Quel que soit notre position, nous avons toujours la tête dans l’eau ! Quelle que soit notre regard, nous avons toujours la tête sous les étoiles !
Et toutes ces nuits sont une infidélité à l’un où l’autre de ces deux mondes comme un attachement à Adam et Ève. Une nécessité du rêve s’opère alors, un secret des passions tristes, celles que l’on ne peut choisir. L’inconfort des vents et des marées, celle qui ne peut choisir son rivage.
Il s’engage alors un voyage contradictoire entre le donné, les courbes, les couleurs et l’ordre recomposé de la raison. L’image – une forme rendue visible grâce à la lumière intérieure pénétrée d’obscurité – devient une scène profonde où la lumière du temps est focalisée par l’iris du
temps et qui fragmente une présence d’absence, une trace brûlée, une ombre. L’intention des séquences, c’est cela qui participe au langage du sensible. Celle-ci est de nature cathartique. La narration s’écrit alors sur la disjonction superposée de la combinaison du discours et de la figure.
En d’autres termes, il s’agit de plans de représentations qui montrent l’objet perdu en temps que transparence ; en terme d’espace, en transgression du tracé révélé. Mais la matrice de l’œuvre serait incomplète si le vécu ne rentrait pas dans la danse !
Comme des inscriptions retranscrites d’un passé symbolique d’une rupture avec l’innocence et qui permet d’écrire d’autres voies de reconstruction, des rêves à travers la poétique du présent.
La métamorphose n’a qu’une direction, la renaissance au profit de l’abandon des images qui au fond ne sont qu’une distorsion de temps de la mémoire. Un clignement du regard entre le signifié et le signifiant, entre le don et le pardon !
La fidélité en somme est le miroir de notre plasticité, de notre rapport au monde. Une illustration de notre désir qui devient livre, qui devient lumière dans cet océan de matières noires. Et pour vivre un temps scellé aux confins de notre nature, notre origine. Celle de notre premier regard sur le monde, celui du passage des ténèbres à la lumière, d’un corps devenu un autre corps !
Un film transparent, sacrifié à l’opacité du temps, jusqu’à en perdre son éclat originel, celui de l’arc-en-ciel.
Ô toi qui erres là-bas, tu sais bien que le chemin pris est celui qui résiste au mal sous peine d’un sacrifice encore plus destructeur,
au risque de brûler le cœur des hommes !
Claude Monet par la création de ses Nymphéas a montré que l’homme par son obstination créative était en mesure de devenir le temps en embrassant la complexité de la nature, des différentes natures de l’homme.
Je suis arrivé à idée de l’Univers, par la sensation…
Une vieille idée en un sens mais qui permet de toucher des doigts légers comme un songe la vérité de son accomplissement, d’éclairer la vie qui passe sous nos yeux et d’embrasser l’étrange frémissement de temps éternel puisque l’homme peut devenir Immortel ; s’il croit en l’amour et non en l’image de sa destruction !
Tu dois persévérer, faire preuve de patience.
Souviens-t-en, si tu veux arriver au point de départ.
Prologue : Marc Michiels pour la partie Orientale de l’ouvrage Divine mélancolie, Marc Michiels (2019) – Éditions Lelivredart.